Jérémy, jeune patient psychotique âgé de 24 ans, admis aux urgences, est un cas « désespéré et désespérant » pour l’équipe de soin. Psychologue dans ce service, on me l’adresse en me précisant sur un ton expéditif et neutre, « Il en est à sa douzième tentative de suicide (TS) ». Ses passages à l’acte ne sont pas des simulacres : défenestration d’un troisième étage (vertèbres fracturées), immolation (visage brûlé), fabrication « artisanale » d’une chaise électrique qui n’a pas très bien fonctionné (doigts de sa main gauche carbonisés). La plupart de ces tentatives lui ont laissé des séquelles physiques qui l’ont déformé et défiguré de façon impressionnante. En salle d’attente, les regards se tournent plus ou moins discrètement vers lui. Conscient et honteux, Jérémy se recroqueville. Il est admis dans un hôpital psychiatrique proche où je le rencontre.
M’habituer à la vision de son visage rend le début de la thérapie assez difficile. Par ailleurs, l’indifférence de l’équipe soignante, le détachement quasi-total du seul membre de sa famille, nous isole lui et moi dans une impression d’absence de soutien.
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